La chute de l'Empire Inca

(Temps de lecture estimé : 5 mn)

Suite à la trahison des conquistadors dans l'épisode précédent, l'empereur Atahualpa, est emprisonné. Pourtant, malgré ce tour de force, tout n'est pas gagné pour les conquistadors.

Conquérir et contrôler un empire de 12 millions d'habitants avec seulement 300 personnes va demander encore quelques sacrifices.

III- Chute de l’empire

Des alliances de circonstances

Bien qu’il soit enfermé, Atahualpa est en théorie empereur d’un territoire uni, depuis sa victoire contre son demi-frère Huascar. Pourtant, cette réunification n’est que de façade. Si les armées d’Atahualpa contrôlent Cuzco, les principaux axes de communication et la plupart des chefferies leur échappent.

Beaucoup de représentants de ces chefferies accourent à Cajamarca pour s’émanciper de la tutelle de l’empire avec l’aide des Espagnols.

Pizarro choisit alors de soutenir la rébellion. Il obtient ainsi l'allégeance de plusieurs ethnies. Son frère, lors d’une expédition méridionale en avril 1533, va même obtenir l’appui des Wankas, une puissante ethnie en délicatesse avec le pouvoir impérial.

Déstabiliser l’empire au maximum

Les conquistadors entendent aussi exploiter l’insurrection des classes inférieures de la société Inca. Fin politique, Pizarro décrète leur émancipation depuis Cajamarca. Il transforme d’une certaine manière un désir d’émancipation en une sorte de révolution sociale.

Ces anciens sujets soumis s’organisent alors en bandes nomades qui iront semer le trouble et le chaos dans les différentes régions de l’empire. Ils élimineront les symboles et les représentants de l’empire, et deviendront le bras armé involontaire des Espagnols, précipitant la chute de l’empire.

Seconde traîtrise

L’empereur, de son côté, a très vite compris la motivation des étrangers : leur cupidité. Pour sauver sa vie, il propose un marché : il remplira une pièce entière d’objets précieux. L’or et l’argent ainsi accumulés seront le prix de sa rançon.

Bien que le gouvernement impérial soit entre leurs mains, les Espagnols ont alors à choisir entre deux voies : laisser la vie sauve à l’empereur Inca pour assurer une certaine stabilité et faciliter le passage de l’empire au régime colonial, ou tuer l’empereur pour satisfaire les tribus rebelles alliées aux Espagnols, comme un gage de non retour.

C'est le deuxième choix qui va l'emporter...

Ayant vent de rumeurs inquiétantes concernant une offensive Inca pour libérer l’empereur et poussés par les ennemis d’Atahualpa, les conquistadors prennent leur décision.

Malgré l’énorme somme d’or versée, l’empereur est accusé de haute trahison, de fratricide sur Huascar et d’usurpation. Il est ensuite condamné à mort au cours d’une parodie de procès. Après la rencontre de Cajamarca, ce sera la seconde traîtrise espagnole.

Atahualpa est assassiné dans sa cellule le 29 août 1533 par strangulation. L’empire Inca est anéanti, il se désagrège, et l’anarchie s’installe partout.

La marche triomphale

L’assassinat d’Atahualpa lie définitivement la cause des Espagnols à leurs alliés locaux, en rébellion face au pouvoir Inca.

Pour éviter le chaos, Pizarro intronise un de ses frères cadets, Manco Capac II, du clan de Cuzco. Avec ce choix, le conquistador va contrôler le nouvel Inca et la noblesse de Cuzco.

L’invasion espagnole se transforme alors quasiment en marche triomphale. Les populations locales se soulèvent en masse, offrant vivres, porteurs ou guerriers aux envahisseurs. L’empire se rétracte vers son cœur, Cuzco, et se réduit presque à son ethnie d’origine. Le 15 novembre 1533, Pizarro et ses hommes arrivent devant la capitale, abandonnée par l’armée impériale fidèle à Atahulpa.

Les conquistadors sont accueillis par Manco et par des fidèles de Huascar. Il faudra cependant encore deux ans aux Espagnols, aidés par Manco, pour venir à bout des armées encore loyales envers l’empereur. En 1535, la guerre est achevée. Le sens politique, l’audace et les traîtrises de Pizarro auront eu raison d’un immense empire en quelques années seulement.

Dernière résistance

Tout n’est pas fini pour autant pour les conquistadors. La mise en place de l’Encomienda, un système de partage des Indiens, condamne les survivants de la conquête aux travaux forcés et aux versements de tributs au profit des conquistadors.

Manco Capac et son peuple, victime de ce servage, vont essayer de se défaire de la tutelle espagnole. En 1536, le jeune empereur profite des divisions qui apparaissent chez les conquistadors et organise la première rébellion. Après plusieurs combats, dont le siège sanglant de Cuzco par 50 000 Incas, ce qui reste de l’empire Inca se replie dans la province de Vilcabamba. Il rétablit les rites Incas et organise une nouvelle cour. Finalement, il meurt en 1545, assassiné par un conquistador qui s’était fait passer pour un allié.

La résistance Inca durera jusqu’en 1572 avec l’exécution de Tupac Amaru, ennemi implacable des conquistadors, dernier Inca quechua. Pour totalement en finir, les Espagnols exécuteront aussi ses descendants, jusqu’au quatrième degré.

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L’anéantissement si rapide de la plus puissante civilisation sud-américaine laisse le champ libre aux Européens, qui vont imposer leur modèle religieux, politique et économique sur le continent, puis dans le monde entier.

Travaux forcés, pillages, maladies. Le bilan est terrible pour les populations locales. La population de l’empire Inca, estimée entre 12 et 15 millions en 1520, passe à 600 000 au début du XVIIe siècle. À travers cette conquête, un nouveau principe, qui perdura jusqu’au milieu du XXe siècle, est posé : le monde entier est une colonie pour l’Europe.



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L'auteur

Loïc Kerferch, 38 ans, cadre au sein d'une entreprise du secteur de l'électronique grand public.

Après avoir suivi des cours d'Histoire à Paris 1 Panthéon-Sorbonne et à l'école du Louvre, Loïc continue à vivre sa passion pour l'histoire à travers ses lectures et ses voyages.

Textes de Loïc Kerferch ; Cartes de Delphine Gagnon ; Éditorial Cédric Soubrié. Corrections : Nathalie Combaz et Florent Blenck. La photo de couverture a été prise par Martin St-Amant (Wikipedia - CC-BY-SA-3.0). Contactez-nous pour réutiliser les cartes ou le texte.

Sources :

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